EL JABLE
CULTURES SUR DUNE MOBILE
Un corridor de sable traversant l’île au gré des vents
Le Jable est un lieu unique sur Lanzarote, vaste corridor de sable et de vent traversant l’île du nord au sud sur 20km de long pour une largeur variant entre 5 et 10km. Paysage ouvert de vastes étendues steppiques balayées par les vents, il oscille entre les blancs et ocres du sable, le rouge de la soude, et le vert gris des aulagas.
Le Jable est aussi le nom de ce sable blanc déplacé par les vents, mélangeant minuscules coquillages, dépôts marins et apports du Sahara, ainsi que la technique de culture spécifique à ce corridor, utilisant le sable comme paillage minéral mobile.
Les différents visages du Jable :
Le Jable a différents visages tout au long du corridor ; steppique, paturé, cultivé, enfriché, il héberge une des cohabitations Humain-Sauvage les plus riches de l'île.
Le paysage est un curieux mélange de dunes, de plaines aux prairies sèches ou aux mosaïques de cultures, et de volcans isolés. C'est la matière - ce sable fin et mobile, partout présent - qui définit son entité et son unicité.
Système de cultures
sous la dune mobile
Les vents transportent le sable marin de part et d'autre de l'île, depuis la baie de Famara au nord jusqu'à Playa Honda au sud, comme une dune qui se cesserait de s’échapper pour venir recouvrir terres fertiles, anciennes coulées de lave et parfois même villages.
Dans certains secteurs, les terres propices à la culture sont couvertes par plusieurs dizaines de centimètres de sable, qui agit alors comme un paillage minéral infiltrant l'humidité et la retenant dans le sol.
Un paillage minéral mobile
La technique de culture dite de jable s’est développée sans doute dès les premières occupations humaines de l’île, et a permis de cultiver sans irrigation les fameuses patates douces de Lanzarote, mais aussi pommes de terre, courges et pastèques.
La pratique de la culture de jable est une négociation constante avec les vents : pour protéger les jeunes plants, pour maintenir une couche de sable adéquate (ni trop fine sans quoi l'humidité s'évapore, ni trop épaisse sans quoi on n'atteint plus la terre !), et enfin pour capter le "jable fresco", sable nouvellement déposé riche en apports minéraux.
Les acteurs
De l'aube jusqu'à 13h, le Jable est en pleine activité : récolte des patates, mise en place des bardos de seigle ou de sorgho africain, nettoyage des parcelles, éventuel traitement au souffre, disposition des pierres sur les jeunes plants de patates douces ...
Les familles venues aider à la parcelle côtoient les quelques agriculteurs professionnels en tracteur, occasionnant parfois le vol d'Aigrettes garzettes, ou la fuite groupée des Outardes.
Éleveurs
Les fermes d’élevages sont nombreuses à s’être implantées dans le Jable - loin de toute habitation, pas de conflit d’usage avec les habitants… Mais il devient rare de voir les troupeaux de brebis et de chèvres majoreras sortir pâturer la steppe.
Le fourrage d’importation est disponible en toute saison, et revient moins cher que le salaire du berger !
Association de producteurs
Le Jable, seul espace agricole mécanisable de l’île, a connu de nombreux changements sur les dernières décennies : apparition de tracteurs de toutes tailles, développement du réseau d’irrigation d’agua regenerada (eau dépurée), abandon progressif de parcelles et surtout celles de jable profundo qui compliquent le travail agricole.
Agriculture familiale
Dans le Jable, l’agriculture professionnalisée et organisée cohabite avec des petites parcelles familiales. Il était courant que chaque famille cultive une parcelle de la Geria pour la vigne, une d’enarenados pour les légumes et les grains, et une de Jable pour les patates douces et courges. Si la rentabilité économique de cette agriculture familiale est loin d’être évidente, l’attachement aux terres reste fort - que ce soit par plaisir du travail aux champs ou respect dû au labeur des générations passées.
Cohabiter avec les oiseaux des steppes
Le Jable forme un écosystème riche et partagé, où les nombreux oiseaux des steppes mêlent leurs habitats aux activités agricoles. Et s’il semble que le sable ne se déplace plus autant qu’avant à travers le Jable, le vent lui est toujours constant. Il actionne les nouvelles éoliennes, qui remplacent le pétrole pour alimenter l’usine de dessalement de la côte. L’eau consommée et dépurée est ensuite envoyée vers le réseau d’irrigation du Jable, où elle pallie aux pluies de plus en plus rares.
Co-habitants des steppes du Jable
Le tiers de la superficie du Jable est un espace naturel protégé au titre de l’habitat de ces oiseaux endémiques, ce qui a permis d’interrompre la réalisation des gigantesques urbanisations touristiques le long de la côte.
Mais cela n’empêche pas de continuer à y cultiver patates douces et pastèques, en bonne entente avec les houbaras et oedicnèmes qui nichent dans les aulagas, avec les aigrettes pique-boeuf qui accompagnent les troupeaux de chèvres et avec le pernocptère égyptien qui vient en nettoyer les quelques carcasses.
Les voix du paysage
Donner voix aux acteurs rencontrés ici et là sur le territoire. Laisser entendre leurs joies, leurs doutes, leurs aspirations.
! À VENIR !